dimanche 10 avril 2016

Lionel Zinsou

27 février 2016



Voici plus d'un mois que je n'avais pas repris l'écriture de mes aventures au Royaume du Danhomè, oui c'est de là qu'est née la République du Bénin lorsqu'elle accède à son indépendance en 1960.
En ce qui me concerne, le début d'année 2016 a été marqué par un court voyage en France, et un désir prégnant d'en vite repartir tant l'ambiance aussi bien sociétale que politique me désespère. Hollande a de nouveau sorti un gadget de sa célèbre boite à outils, destiné paraît-il à résorber la crise de l'emploi, sans jamais réaliser que ce ne sont pas les mesurettes favorables aux patrons qui créent de l'emploi, mais la croissance, le moral des français et l'activité des entreprises. Au cours de ce passage, j'ai eu la surprise de voir le fisc me réclamer une taxe d'habitation d'un montant prohibitif pour une simple adresse de domiciliation sur un immeuble de SCI ! Heureusement que je n'avais pas pris une boite postale, sinon il m'aurait imposé sur la valeur locative de la Poste Colbert.
Lorsque je quittais Cotonou, fin janvier, je finissais de rédiger « Règlement de compte à Fidjrossè – Acte I. », et plusieurs – parmi ceux qui me lisent – m'ont questionné sur la suite. Je vais donc les faire languir encore un peu, car le dénouement de ce litige n'est pas clos, et je voudrais que l'acte II permette à toutes les parties de tirer la morale de cette malheureuse affaire.
Le grand sujet qui agite les béninois et nourrit toutes, ou presque, les conversations ici, depuis mon retour, c'est l'élection présidentielle au pays, dont le premier tour de scrutin aura lieu le six mars prochain. Comment – à cette occasion – pourrais-je faire l'impasse sur mes ressentis ?
Les murs, les avenues, les panneaux publicitaires ont été pris d'assaut par les équipes de campagne des candidats, et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'on observe une véritable colorisation de la ville. On commence aussi à voir circuler des véhicules, des zems, qui arborent les couleurs de tel ou tel prétendant à la magistrature suprême. A la télévision, les débats ont commencé, et les récipiendaires parcourent le pays, suivis par des convois plus ou moins conséquents selon l'importance des moyens financiers mis en action. Une chose est cependant certaine : l'argent coule à flot, aussi bien pour le matériel de propagande que pour la rétribution des militants. Voilà au moins une chose positive.
Je vais m'arrêter sur les quatre principales figures qui sont susceptibles de l'emporter au second tour, car il y a eu pléthore de candidatures, je crois qu'au dernier recensement de la Commission Électorale, il en restait 32 en lice.
Mon premier billet sera pour le candidat du pouvoir sortant, qui – il faut le rappeler – a vu vu deux mandats de Boni-Yayi se suivre en l'espace de dix années. Mises à part les groupies, l'appréciation populaire et générale va quasiment de mauvaise à très mauvaise : gabegie, non-respect des promesses électorales, scandales financiers, détournements de subventions internationales… j'en passe et des meilleurs. Alors forcément, ça n'aide pas le dauphin choisi par le Président sortant, un dénommé Lionel Zinsou, franco-béninois parachuté voici à peine six mois de France pour être nommé Premier Ministre au Bénin. Et maintenant candidat. Oh, certes, le bonhomme est doué, il a étudié et a fait une belle carrière à la Banque Rothschild, est passé dans le cabinet ministériel de Laurent Fabius pour lequel il écrivait les discours. Comme quoi, il y a toujours un revers à n'être pas né de la bonne couleur, noir ou blanc. Lui est métis, considéré comme «blanc» à la solde de Paris par beaucoup de béninois, alors que son oncle fut Président du Bénin en 1968. Vous avouerez que passer de « nègre » de Fabius à « yovo » de Boni-Yayi, ça peut donner envie de sourire.
Le coup de grâce pour lui est tombé hier, par la voie de l'ancien ambassadeur de France à Cotonou, Jean- Paul Monchau, qui s'est fendu d'une lettre ouverte dont s'est emparée le presse locale, dans laquelle il explique que Lionel Zinsou n'est candidat que pour assurer l'immunité de Boni-Yayi au lendemain de l'élection. Alors que ses équipes de campagne promettaient le KO dès le premier tour, j'ai le sentiment que leurs prétentions ont considérablement diminué ces derniers jours, comprenant que l'union des partis de la coalition ne signifiait pas pour autant l'union des électeurs sur le nom de Zinsou face à l'urne.
Au plan politique, Lionel Zinsou présente l'avantage d'être l'homme neuf, arrivé de loin, qui n'a pas d'affidés et n'est redevable à personne ; ce qui pourrait le servir pour gouverner. En revanche, sa perception passée d'une Afrique qui appartiendrait à l'Europe passe mal ici, malgré qu'il s'en défende à présent, assez maladroitement. Non, son plus gros handicap, c'est d'être le Dauphin du sortant. Et le risque, s'il gouverne, c'est qu'il devienne le « Alassane Ouattara béninois », cad. le financier qui redresse les finances publiques sous la conduite de la Banque Mondiale et du FMI, qui favorise le développement et les profits réalisés par les grandes sociétés multinationales, mais qui relègue au second plan des urgences, voire laisse stagner le petit peuple dans ses soucis quotidiens d'avoir l'eau courante, l'électricité sans délestage, un accès facilité aux soins à à l'éducation, et je ne parle pas du boulot pour les diplômés qui chôment.
Zinsou – amha – sera présent au second tour ; sa machine partisane est très puissante, elle domine et régente toutes les strates des pouvoirs locaux et des administrations ; de plus, les petites magouilles, soigneusement orchestrées semblerait-il, portant sur la distribution des cartes d'électeurs devraient jouer en sa faveur. C'est à l'issue du premier tour que les choses devraient se corser pour lui, il va se retrouver seul contre tous.
Mon pronostic, c'est qu'il ne sera pas élu, mais battu par l'un des ses challengers.
[à suivre]

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